Il pensait avoir parcouru la
moitié du chemin. Il était parti si vite qu’il avait oublié de prendre quelques
provisions pour lui, le Temps de faire la route.
Il se mit à douter. Avait-il
été trop téméraire? Est-ce que l’Homme-à-la-longue-barbe-blanche-et-au-bedon-rond
apprécierait vraiment la surprise qu’il lui préparait?
Le sentier bien tracé ne
causait pas problème, mais sur ses joues il crut sentir le souffle léger du
vent, un vent piquant transportant de minuscules cristaux de glace. Il lui
semblait que les environs se brouillaient d’un voile. Les broussailles
bougeaient imperceptiblement. Il hâta le pas.
Ray et Lou, après avoir suivi
respectivement les rives sud et nord du lac John sans succès, avaient laissé
les chiens se reposer un peu avant de revenir au point de rencontre. Le retour
au village s’était fait d’une traite. Ray trouvait Mouffe insoumise. Elle
tirait continuellement de côté dès qu’elle le pouvait. Il ne la comprenait pas.
Dehors, des dizaines de
personnes arrivant de toutes les directions, racontaient leurs recherches
infructueuses, secouaient leur pelisse des légers flocons qui la couvrait,
avant d’entrer dans la salle du Conseil.
Ray et Lou, après avoir
attaché leurs attelages, leur emboitèrent le pas. À l’intérieur, on servait thé
et biscuits. Les uns se réchauffaient les mains en les frottant énergiquement,
les autres avaient le regard fixé sur leur tasse fumante.
On échangeait à voix basse
comme si le ton avait pu changer le cours du jour. Certains disaient avoir vu
des pistes de petits pieds, créant faux espoir par-dessus faux espoir. Un
groupe avait marché vers le nord, suivant le sentier de motoneige qui menait au
lac de la Squaw.
Ray prêta l’oreille. Il avait
amené bien souvent Jude à la cabane, construite à une dizaine de kilomètres de
là.
Il ressentit un pincement à la
poitrine. Sombre prémonition, est-ce que l’enfant aurait pu s’y diriger?
Le vent soufflait de plus en
plus fort. Jude avait froid. La fatigue coupait ses pas. Il reconnut le gros
rocher gris sur lequel il avait si souvent grimpé, quand son Grand-Père
surveillait la horde de caribous. La cabane n’était plus très loin. Un ou deux
kilomètres et il pourrait se reposer à l’abri. Un regain d’énergie lui fit
retrouver un pas rapide. Il allait faire honneur à Grand-Père Ray et aller
jusqu’au bout de son périple.
Le
louveteau commençait à avoir les pattes gelées. Il progressait à la droite de
la chose-à-deux pattes. Il se sentait brave et même s’il savait déjà que cette
quête ne lui remplirait pas l’estomac, il s’obstina à la suivre.
Tout
à coup, au loin, un genre de grotte se découpa. Immense, imposante. La chose-à-deux-pattes
s’y dirigea allègrement. Incapable de s’arrêter, le louveteau la suivit.
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