Samedi matin s’étirait paresseusement,
exactement comme j’affectionnais maintenant les débuts de journée. Sirotant
l’habituel café au lait accompagnant la phase du qu’est-ce-que-je-fais-aujourd’hui, l’envie me vint de prendre des
nouvelles de l’Oncle Jac.
Parce
que je m’inquiétais du comment il se débrouillait avec sa récente solitude,
depuis le départ de sa Compagne de Vie des 30 dernières années.
J’avais enfoncé à quelques
reprises depuis la mi-janvier, les touches de son numéro. Sans réponse. Ça
m’intriguait. Pouvait-il être malentendant à ce point? Pouvait-il,
curieusement, être absent à chaque fois que je tentais de le joindre?
Ce matin-là, après être une
fois de plus, restée sur une sonnerie qui ne trouvait pas preneur, l’idée me
vint de téléphoner au seul Oncle maternel qui pagayait encore sa Vie.
Après quelques échanges, j’appris
qu’Oncle Jac était possiblement hospitalisé. Le Temps d’effectuer quelques
recherches, je le trouvai enfin : Hôpital Maisonneuve, 10e
étage. Il répondit à la première sonnerie.
Du
coup, l’hypothèse de la surdité sévère tomba.
On bavarda une bonne trentaine
de minutes. Dans sa voix, j’entendais un « ne raccroche pas ». Présomption peut-être. Il semblait heureux
de jaser. Je l’étais aussi. De l’avoir au bout du fil. J’en ai profité pour faire
le plein d’informations sur sa famille, son entourage. Au cas où…
Je discernais dans ses propos,
l’inquiétude d’avoir abandonné la maison remplie de sa Vie. Il parlait de sa
musique, de ses disques. « J’ai tout
laissé derrière moi. » Je me suis assurée qu’il avait quelqu’un pouvant
l’aider, lui répétant qu’il pouvait aussi, et malgré la distance, compter sur
moi en tout Temps.
Émue, j’ai fermé le
cellulaire. Je venais d’avoir une autre claque en pleine face de ce que pouvait
réserver la Vie. Les propos décousus de mon Oncle, passant du « je marchais en face de l’hôpital quand ils
m’ont ramassé » au « je me
suis enfargé dans la maison et suis tombé et ils ont vu ça avec la caméra »,
m’arrachaient le cœur. Qu’est-ce qui se tramait dans sa tête depuis le départ de
Tante Pad?
La nuit qui suivit, je fis un drôle
de rêve dont il ne me reste que des bribes.
« … Je devais aller dîner avec Maman Fitzsou. Ça devait faire un bon 20 ans
que nous n’étions pas allées manger ensemble! Ben pour dire… Ayant
un empêchement, je devais la contacter pour l’en aviser. Je ne savais pas comment.
Ça me faisait capoter… »
Je n’y comprends que dalle aux
rêves. Ce que je sais, c’est que le subconscient arrive à faire des liens entre
le réel et l’imaginaire. Faut dire aussi qu’en soirée, voulant faire un peu de
triage parmi les nombreux cahiers d’écriture inachevés, je suis tombée sur le
journal contenant des lettres à ma mère. Écrites après son départ.
Ça
doit être la raison pour laquelle nous avions rendez-vous pour luncher ensemble
cette nuit-là…
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