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Marque d’Amour



« … J’étais assise aux côtés de Papa Fitzsou. C’était son troisième repas de la journée à la salle à manger. Ça pouvait paraître anodin, mais la semaine avait été plus que difficile pour lui. J’étais soulagée de le voir prendre du mieux. 
 
À table, une grande Dame prenait place en face de lui. Il manquait encore deux convives. Je savais que l’un d’entre eux ne viendrait pas. Souffrant d’un problème de santé aigu, il avait dû être hospitalisé.

Tout à coup, je vis s’avancer à coup de roues de tortue, la Dame qui occupait la place à la droite de Papa Fitzsou… 

Comme à son habitude, un sourire illuminait son visage où les rides n’avaient pas encore élu résidence. Ses cheveux, coiffés en boucles sages, encadraient une peau presque diaphane.

Semblant enchantée de me trouver là, elle s’empressa d’extirper du côté de son fauteuil roulant et de façon quelque peu malhabile, une enveloppe marbrée de rouge.

« Hey que je suis contente de te voir! J’avais demandé si tu y étais, mais on m’avait dit qu’on ne t’avait pas vue. » lança-t-elle d’un expire.

« J’ai préparé ça pour toi. Pour ta fête… »

Ébahie, je pris l’enveloppe et commençai à lire. Voyant l’âge que la Dame supposait que j’aurais, j’éclatai de rire. « Quoi? Soixante-quatre ans?... » Un peu penaude, elle me regarda. « Ce n’est pas ce que tu m’avais dit? »

« Non, mais ce n’est pas grave… »

« Mais tu dis tout le Temps que tu es la plus vieille des Filles? »

« Oui, et c’est vrai… »

« Ouvre, y’a autre chose là-dedans… »

Je sortis la carte de l’enveloppe. À l’intérieur, elle avait écrit : « Ton conjoint pourra arroser les boulettes au réveillon de Noël. »*

« C’est parce que je n’ai pas de conjoint Mme B. »

« Ah non? Je pensais que tu m’avais dit ça… »

« Ce n’est pas grave, ce doit être de bon augure. Vous êtes peut-être un peu devin… »

On conversa de tout et de rien tout le long du repas que l’on parsema d’éclats de rire au grand plaisir des autres résidents. 

Quand je réintégrai mon petit appartement en début de soirée, je réalisai que je venais d’être nourrie d’une des plus belles marques d’amour qui soit.

Ciel que je suis chanceuse!!!... »
* Je vous ai déjà raconté, que traditionnellement dans le Temps des Fêtes, on cuisine pour le souper du 24, un plat de boulettes de porc aigre-douce que l’on doit arroser toutes les 10 minutes durant la cuisson. 
Chez-nous, ce rôle revenait d’office à mon Jeune Frérot, ou, s’il n’y était pas, à l’un des Hommes présents… Pourquoi? Aucune idée… ;-) 
Comme j’ai partagé la recette avec Mme B, j’ai aussi inscrit la « règle-de-l’arrosage »… Elle s’en souvenait…



Commentaires

Zoreilles a dit…
C'est une carte très touchante...
La Dame l'est tout autant Zoreilles... Un vrai petit coeur ambulant!
Le factotum a dit…
Dites bonjour à la charmante dame, je la verrai dans quelques jours.
Je crois bien que vous la reverrez avant moi... M. Le Factotum!

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